J’aurais dû prendre un hibou. Cette pensée m’avait traversée lorsque Papouille avait décidé de jouer avec un fard à paupières qu’il avait complètement démoli. Ce n’était pas la première fois que ça arrivait, et je commençais à en avoir assez. Il fallait que je trouve une solution pour ranger mes trucs un peu fragile. J’avais donc grondé mon chat et avais continué de me pomponner tranquillement, puisque j’avais déjà revêtu une robe noire évasée qui m’arrivait en-dessous du genou. On était samedi, j’avais déjà pris mon petit déjeuner, j’avais le temps puisque j’avais eut la flemme de me maquiller en me levant. Je venais de finir lorsqu’un bruit de mauvaise augure m’avait fait sursauter. Celui de mon flacon de parfum hors de prix se brisant sur le sol.

« PUTAIN PAPOUILLE !!!! »

Ma pauvre bête avait dû sentir qu’elle finirait en descente de lit si elle ne déguerpissait pas très vite, parce qu’une seconde plus tard je courais derrière avec l’intention de lui passer le savon de sa vie. C’était sans compter le fait que mes ballerines étaient très glissantes. Au détour un couloir, ce qui devait arriver arriva : une des plus belles chutes de ma vie.

Avant que je ne puisse comprendre quoique ce soit, mes pieds avaient décidé qu’ils ne continueraient pas et je me retrouvais donc étalée de tout mon long par terre. J’avais été tellement surprise que je n’avais pas eut le temps de placer un bras pour protéger ma tête qui avait donc tapé par terre. Il me fallut quelques secondes pour me redresser et m’asseoir en portant une main à ma mon visage. J’avais le crâne et la pommette éraflés et, surtout, un mal de tête qui n’était pas prêt de partir.

« Saloperie de chat! Si je l’attrape je me fais un porte-monnaie en fourrure! »

Le samedi était le seul jour de la semaine de Sgàrth qui n'était pas entièrement consacré à quelque chose. Pour une fois il avait décidé de mettre un t-shirt (noir, comme toujours), plutôt qu'un pull, même si cela signifiait qu'on voyait ses cicatrices courir le long de ses bras. Comme si son visage n'en disait pas déjà assez long sur son histoire. Le petit déjeuner s'était déroulé dans un calme incroyable et il avait beaucoup apprécié ce moment. C'est donc avec une grande sérénité qu'il était prêt à aller se promener dans le parc et pourquoi pas faire des rencontres.

Il avait ramené un livre emprunté il y a peu à la bibliothèque et était désormais libre de toute obligation. Au deuxième étage, alors qu'il allait poursuivre son chemin jusqu'au lac, il vit... un vol plané. Mais pas le petit vol plané gracieux d'un colibris hein. Un vrai vol plané avec un bruit de chute qui le fit grimacer. Ses longues jambes (il atteignait tout de même les deux mètres) le menèrent rapidement au lieux où une flaque noire était étendue. La jeune fille lui tournait le dos. Quand elle se mit à hurler, il éclata d'un rire grave. Il l'a contourna pour lui tendre la main, ce qui lui permettrait de se relever.

-C'est très mal, tu sais, le trafic de fourrure.

Il lui offrit alors un sourire en coin, avec l'air presque blasé. Ses longs cheveux noirs chatouillaient son visage. La jeune fille s'était éraflé le visage, mais ce n'était rien qui n'était pas à la portée de sa baguette magique. En effet, le jeune homme avait apprit quelques sorts très utiles pour guérir les petits bobos, surtout pour sa petite soeur en fait, qui s'aventurait toujours dans des lieux incongrus et finissait invariablement pas s'écorcher les genoux.

Pendant deux secondes, mon coeur s’arrêta de battre alors que je me retournais vivement pour regarder derrière moi, d’où avait soudain surgit un bruit que je n’avais pas immédiatement reconnu. C’est lorsque mes yeux tombèrent sur le grand, très très grand, jeune homme que la lumière se fit dans mon esprit : ce que j’avais entendu était un rire. Soulagée, j’acceptais volontiers la main qu’il me tendait et me relevais en grimaçant, constatant que tout mon côté gauche était endolori.

« Je ne comptais pas en faire un trafic, mais transformer mon chat inutile en quelque chose d’utile qui ne casserait rien, en prime. »

Répliquais-je en grimaçant un sourire, avant de me raviser en sentant que ça tirait sur ma joue. Du bout des doigts, je tâchais d’évaluer les dégâts. C’était très douloureux, mais saignait peu. A priori, rien de bien méchant donc.

« Euhm... Merci de m’avoir aidée à me relever! Moi c’est Meredith au fait. »

Déclarais-je en lui tendant ma main droite. J’en profitais pour rapidement détailler son visage, qui me disait vaguement quelque chose. J’avais sans doute dû le croiser dans les couloirs à plusieurs reprises.

« Du coup... Je suppose que tu m’as vue m’écraser par terre avec une élégance folle? »

Bon sang! Pourquoi n’étais-je pas capable de faire des rencontres NORMALEMENT? Il fallait toujours qu’il m’arrive une mésaventure et que je me retrouve dans une situation ridicule. A cette pensée, je passais une main dans mes cheveux avec un lourd soupir. Je lançais ma main sur le côté, pour fouiller mon sac et y prendre un mouchoir, mais ne rencontrais que le vide. Dans ma précipitation, je n’avais rien pris avec moi, et cela me tira un nouveau soupir, alors que je sentais mes yeux s'humidifier. Je ne savais même pas pourquoi! Je n'allais tout de même pas pleurer parce que j'avais oublié mon sac?!

« Et évidemment, j’ai plus pensé à étriper Papouille qu’à prendre mon sac avec moi... Tu aurais un mouchoir? »

Ca m’embêtait de demander quelque chose à quelqu’un que je ne connaissais pas, mais ce n’était qu’un mouchoir... Et j’en avais objectivement besoin.

-C'est normal d'être venu t'aider !

Il lui offrit un sourire et remit une mèche des cheveux de la jeune fille en place. Alors, il se rappela que c'était à lui de se présenter.

-Je suis Sgàrth, Sgàrth Giommanach. Elève de Serpentard en Septième et dernière année. Enchanté, Meredith.

Il s'était redressé de toute sa hauteur pour se présenter, exactement comme on le lui avait apprit. Sa grand-mère aurait été plutôt fière de le voir ainsi, droit, beau, le visage dégagé. Malheureusement pour lui cela signifiait que ses cicatrices ressortaient encore plus. Il serra la main de Meredith puis passa un doigt sur la cicatrice qui ornait son nez.

-Oui, je t'ai vue... c'était très artistique ! Lança-t-il, hilare.

On l'observant, il vit les yeux de la jeune fille devenir plus humides. Perplexe, il fronça les sourcils. Elle ne devait pas aller bien pour être aussi sensible.

-Tu as mal quelque part ? Tu veux que je referme tes blessures ?

A peine eut-il demandé ça qu'il avait déjà sorti sa baguette magique. De son autre main, il sorti un mouchoir. Un vrai mouchoir en tissu, avec les initiales du jeune homme, ainsi que les armoiries familiales. Sans demander la permission, chose qui était drôlement rare venant de lui, il tapota la pommette de Meredith pour nettoyer la plaie.

-Voilà, c'est rien.

Il lui sourit en lui montrant les quelques gouttes de sang qui maculaient le mouchoir. Sgàrth avait agit par automatisme, ayant l'habitude avec sa petite soeur. Elle lui manquait affreusement. Il plaça son mouchoir contre son torse et lui lança un sourire un peu mesquin.

-Par contre, si tu en as besoin pour pleurer, je refuse qu'une fille aussi jolie confie ses larmes à ce mouchoir.

Ses yeux rubis brillèrent d'un éclat amusé et il passa sa main dans les cheveux.

J’avais cligné plusieurs fois des yeux, un peu surprise, quand Sgàrth s’était présenté avec son nom de famille, sa maison et son année. Pourquoi n’avais-je pas pensé à en faire autant? Je ne savais pas. Je secouais négativement la tête quand il me demanda si j’avais mal, mais c’était un pur mensonge. Je voulais juste qu’il me laisse trente seconde pour ne pas que je me mette à pleurer comme une imbécile.

Je me laissais faire quand il tamponna ma joue et, de toute manière, je n’aurais pas pu l’en empêcher parce que je n’avais rien vu venir. Quand il me présenta son mouchoir, maintenant légèrement taché de sang, en me disant que ce n’était rien, je réussis à lui grimacer un sourire et à lui croasser ce qui s’apparentait à un merci. Décidée à ne pas pleurer, je portais mes mains à mon visage pour appuyer un doigt au coin de mes yeux, battant des paupières pour chasser mes larmes tandis que je prenais une grande inspiration que j’expirais lentement pour dénouer ma gorge.

« C’est rien, ça va aller... C’est hallucinant, je pleure pour rien ces derniers temps! »

J’essayais de plaisanter, mais je n’en menais pas large. Cela faisait presque deux semaines que je m’étais pris un râteau tel que je n’aurais pas pu en imaginer, et ça allait mieux. La plupart du temps. Je souriais, je faisais des blagues, je suivais les cours. Puis, d’un coup, pour une connerie la plupart du temps, je me mettais à pleurer.

« Euhm... Au fait, mon nom de famille c’est River... Poufsouffle, sixième année. »

Déclarais-je avec un sourire gêné, pour compléter ma présentation pour le moins sommaire de toute à l’heure. Et ce fut seulement là que je remarquais que Sgàrth avait les yeux rouges. Ca m’avait un peu surprise, aussi bien de le voir seulement maintenant que la couleur en elle-même, mais je songeais qu’avec mes yeux dorés ça ne devait pas être beaucoup mieux.

« Et puis je suis pas si jolie que ça. En tout cas pas assez pour... »

Je m’interrompis, détournant la tête. Je n’allais tout de même pas raconter mes peines de coeur à quelqu’un que je venais de croiser?

« Je suis désolée, je ne te retiens pas plus longtemps. »

Fis-je, en reculant d'un pas, toujours sans le regarder.

Sgàrth fut rapidement gêné en voyant les yeux de Meredith devenir humides. Il se gratta l'arrière du crâne en serrant les lèvres, désemparé. Quand sa petite soeur pleurait, il n'hésitait pas et la câlinait avant de la chatouiller et lui raconter des blagues jusqu'à ce que son sourire revienne. En général, cela prenait trente secondes montre en mains. C'était toujours plus facile de redonner le sourire à une petite fille qu'à une adolescente. Surtout une adolescente que l'on ne connaît pas. Et il en savait quelque chose, aux vues de l'année catastrophique qu'il avait passé avec son ex petite amie, et pourtant, elle, il l'a connaissait.

-Hmm...

Il ne trouva pas grand chose d'autre à dire quand il l'entendit s'excuser, car déjà la sonnette d'alarme retentissait dans son esprit. Pour l'instant, toutes les filles qu'il avait connu n'auraient jamais apprécié qu'il reste dans les parages pendant qu'elles pleurent, Sgàrth n'avait jamais vraiment comprit pourquoi mais c'était ainsi. Le jeune homme passa son index sur la cicatrice qui barrait son nez, comme à son habitude quand il réfléchissait. Il hocha la tête, signe qu'il avait bien enregistré le nom de famille ainsi que la maison de Meredith.

Sgàrth n'aimait pas vraiment quand les filles se mettaient à se plaindre, surtout sur des choses complètement fausses. Il leva les yeux au ciel avant de la toiser à nouveau.

-J'aurai une requête. Ne doute pas de ce que je dis, s'il te plait. Si je te dis que tu es jolie, c'est que tu l'es, qu'importe ce que les autres en disent.

Elle recula et Sgàrth sourit.

-Aucun soucis. Je vais te laisser. Je comptais aller me promener un peu. Si jamais tu as besoin de moi, tu sais où me trouver !

Il lui fit un clin d'oeil avant de faire demi tour.